Laurie Dall’Ava
© Laurie Dall'Ava
Biographie
Laurie Dall’Ava est artiste, elle vit et travaille à Arles. Diplômée de l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles avec les félicitations du jury en 2011, elle réalise un post-diplôme au Centro de la Imagen à Lima au Pérou et intègre le Reflexion Masterclass, un programme international de recherche sur la photographie contemporaine. Elle expose son travail au Musée des Abattoirs et intègre la collection du FRAC Occitanie en 2015. Son travail a été exposé dans des centres d’art contemporain et musées en France et à l’étranger tels que le Centre Photographique d’Ile De France à Paris, Mécènes du Sud à Montpellier, le Parvis à Tarbes, le Creux de l’Enfer à Thiers, la Maison-Salvan à Labège, la Villa du Parc à Annemasse ; CAS-co et STUK, House for Dance, Image and Sound à Louvain en Belgique, le Museo Villa Dei Cedri à Bellinzone, en Suisse.
Laurie Dall’Ava est une artiste. Diplômée de l’Ecole Nationale Supérieure de la photographie en 2011, elle vit et travaille actuellement à Arles. Suite à son diplôme, elle commence à exposer dans différents centres d’arts contemporains en France ainsi qu’à l’étranger.
Dans son travail, elle mêle dans ses installations des univers et des temporalités qui normalement ne se côtoient pas. Egalement, elle met en lumière deux branchements en mettant en commun le vivant et le non-vivant, mais aussi le monde organique du monde minéral : ainsi la ressemblance entre les mouvements telluriques et les phénomènes de transe se retrouvent fréquemment dans ses œuvres. Nous pouvons comparer cela à un déploiement mycélique.
In-Visible comme exposition et comme exploration, joint et transmet ce rapport pluriel au visible et à l’invisible à travers Emerald Green Pigment, œuvre multidimensionnelle (installation-photographies, 2018).
En quelques mots
Laurie Dall’Ava conçoit ses installations, comme des modules symbiotiques, où cohabitent des mondes et des temporalités qui ne se rencontrent ordinairement pas, mais qui sont pourtant co-intriqués par les analogies conceptuelles et poétiques qui les traversent. Les notions de transformation et d’énergie, au sens à la fois physique et alchimique, l’intéressent tout particulièrement et parcourent son oeuvre. L’énergie agit comme une force invisible qui parcourt l’univers tout entier, reliant secrètement « ce qui est en haut à ce qui est en bas », pour reprendre la formule qui ouvre La Table d’Emeraude*. C’est cette double articulation que Laurie cherche à mettre en lumière, en rapprochant par exemple le vivant du non-vivant, le monde organique du monde minéral : ainsi l’analogie entre les mouvements telluriques et les phénomènes de transe se retrouve t’elle fréquemment dans son travail, comme si sortir de soi, changer d’état était une loi commune à tout ce qui est, une confrontation nécessaire à un Dehors, à un Autre, ou à un Ailleurs. Cet « ailleurs », espace interstitiel et poreux, est le point imaginaire où des univers en apparence distincts peuvent se rencontrer, et où les oppositions s’annulent dans un même mouvement de transformation.
Travaillant fréquemment à partir d’archives de sources très variées, qu’elle met en relation avec d’autres média et matières (textes, objets, sons, peintures et photographies) son travail fait référence à la conscience, à la perception, à l’origine manquante des données et à leur transformation imaginaire ; à notre rapport au Vivant, à la croisée de la géologie, de la biologie ou des neurosciences.
* Tabula Smaragdina en latin, est un des textes les plus célèbres de la littérature alchimique et hermétique attribué à Hermès Trismégiste.
Laurie Dall'Ava, Dissolution du pigment EGP avant pulvérisation, 2023
Laurie Dall'Ava. EGP #10 (diptyque). Impression et peinture à l’huile sur panneau de bois et poudre de marbre. 120 x 120 cm et 12 x 120 cm, 2024
Vue CAC Villa du Parc
©Aurélien Mole
Victor Mazière
Emerald Green Pigment -
ou la poésie du fragment.
Laurie Dall’Ava est artiste. Elle réside et travaille actuellement à Arles. Diplômée de l’Ecole Nationale Supérieure de la photographie en 2011, elle réalise un post-diplôme au Centro de la Imagen à Lima au Pérou et intègre le Reflexion Masterclass, un programme international de recherche sur la photographie contemporaine. Suite à son diplôme, elle commence à exposer dans différents centres d’arts contemporains en France ainsi qu’à l’étranger¹. Elle a notamment exposé son travail au Musée des Abattoirs et intègre la collection du FRAC Occitanie en 2015.
Si Laurie Dall’Ava a longtemps œuvré dans le champ de la photographie – qui reste son médium de prédilection – l’artiste s’est intéressée depuis quelques années aux nombreuses relations entre art et science. Aujourd’hui, elle mêle dans ses installations – « qu’elle conçoit comme des modules symbiotiques – des univers et des temporalités qui normalement ne se côtoient pas, qui sont pourtant co-intriqués par les analogies conceptuelles et poétiques qui les traversent »². « C’est cette double articulation que Laurie cherche à mettre en lumière, en rapprochant par exemple le vivant du non-vivant, le monde organique du monde minéral :ainsi l’analogie entre les mouvements telluriques et les phénomènes de transe se retrouve-t-elle fréquemment dans son travail »³, nous dit encore l’auteur. L’artiste travaille en effet à partir d’archives qu’elle met en relation avec d’autres médias et matières, pour ainsi dire de manière rhizomique ou “mycélaire”. Comme le dit à nouveau avec beaucoup de pertinence Victor Mazière « son travail fait référence à la conscience, à la perception, à l’origine manquante des données et à leur transformation imaginaire ; à notre rapport au vivant, à la croisée de la géologie, de la biologie ou des neurosciences »⁴.
L’œuvre multidimensionnelle Emerald Green Pigment, (installation-photographies, 2018),résonne tout particulièrement avec l’exposition
In-Visible. Magnum opus de Laurie Dall'Ava, EGP (Emerald Green Pigment) constitue à la fois une œuvre et à la fois un travail de recherche. Son objectif ? Créer une couleur inédite, totalement originale. Un projet à la frontière du visible : « Je cherche à obtenir une couleur particulière, un spectre de vert qui n’est pas disponible dans les pigments existants, et qui soit d’origine organique, et non minérale »⁵. Cette production singulière se liant de manière filaire au reste de ses productions et non seulement une couleur mais un pigment vivant et changeant, synthétisé avec l’aide de Victor Mazière depuis 2018.À l'origine de ce projet, il y a un voyage au Brésil. Dès son retour, Laurie Dall'Ava voulait ajouter à son travail la couleur vert émeraude grâce à l'usage d'un pigment chlorophyllien d’origine organique.
EGP est un pigment semi-synthétique composé de deux molécules organiques modifiées
pour devenir soluble dans l’eau. EGP a des fonctions multiples. Cette création plurielle est
en effet utilisable pour l'impression sur soie, peintures, ainsi que des installations. La
chlorophylle et les cyanines (provenant de cyanobactérie) sont extrêmement fragiles par
nature et vingt-quatre heures d'exposition à la lumière ou à la chaleur seulement suffiraient à
leur faire perdre leur teinte et leurs bienfaits pharmaceutiques.
Afin de remédier à ce problème et d’augmenter la durée de vie de leur vertu antibactérienne,
une troisième molécule incolore et anti-oxydante a donc été créée et modifiée spécialement
pour être ajoutée au pigment. Triade complète. La couleur vert émeraude est l'indicateur du
fonctionnement de cette triade et de la conservation parfaite de son profil biochimique. Ce
protocole de création a permis à Laurie Dall'Ava de générer non seulement une couleur
mais une œuvre hybride, à la croisée de plusieurs univers, ancrée tout à la fois dans le
visible, l’invisible, la médecine et le chamanisme.
De nombreuses créations ont été produites à partir du pigment, par exemple EGP #04, une
sérigraphie qui représente une algue extraite d’une planche botanique, ou Extraction I une
fiole remplie d’eau et de pigment posée sur une étagère, à la fois sculpture et installation,
évoquant l’univers scientifique, médical, alchimique, comme une forme de mise en abîme.
Dans l’installation Chronoplast on retrouve également la présence du pigment. Dimension
mémorielle pour rappeler le processus de photosynthèse (la chlorophylle capture les
rayonnements infrarouges du soleil depuis des milliards d'années) qui a permis l’apparition
de l’atmosphère terrestre et la floraison de la vie sur terre. Dans cette œuvre EGP sert
d’encre et d’ancre : comme la trace visible d’une mémoire invisible, inatteignable par nos
moyens, mais à laquelle la technologie contemporaine nous permet d’accéder.
L’artiste rend visible, elle “met” en œuvre la beauté de la vie et l'extraordinaire travail de la
nature dans nos vies. Il est question de vie, toujours. D’une célébration de la vie au-delà du
visible. En ce sens, l’artiste crée un pont spatio-temporel grâce à ses œuvres à ce qui nous
tient en vie et dont nous avons conscience, et active de grandes questions. Dimension
mémorielle, dimension médicinale, dimension vitale, dimension existentielle, dimension
chamanique, et tout ce qui nous relie à l’univers et dont l’apparition de la chlorophylle est
une étape : toutes les œuvres faites à partir d’EGP sont donc chargées de sens et d’une
poésie mixant science et chamanisme.
Ainsi nous dit-elle que vie et mort sont liées, tressées, comme le sont guérir ou tuer, ce qui
n'est pas sans nous évoquer la notion de pharmakon
6
, abordée récemment notamment par
Bernard Stiegler. Les chamanes ouvrent des portes entre les mondes visibles et invisibles
grâce aux psychotropes. Laurie Dall’Ava ouvre des portes grâce à ses œuvres : autant de
gardiens de l’invisible.
EGP est un pigment semi-synthétique composé de deux molécules organiques modifiées
pour devenir soluble dans l’eau. EGP a des fonctions multiples. Cette création plurielle est
en effet utilisable pour l'impression sur soie, peintures, ainsi que des installations. La
chlorophylle et les cyanines (provenant de cyanobactérie) sont extrêmement fragiles par
nature et vingt-quatre heures d'exposition à la lumière ou à la chaleur seulement suffiraient à
leur faire perdre leur teinte et leurs bienfaits pharmaceutiques.
Afin de remédier à ce problème et d’augmenter la durée de vie de leur vertu antibactérienne,
une troisième molécule incolore et anti-oxydante a donc été créée et modifiée spécialement
pour être ajoutée au pigment. Triade complète. La couleur vert émeraude est l'indicateur du
fonctionnement de cette triade et de la conservation parfaite de son profil biochimique. Ce
protocole de création a permis à Laurie Dall'Ava de générer non seulement une couleur
mais une œuvre hybride, à la croisée de plusieurs univers, ancrée tout à la fois dans le
visible, l’invisible, la médecine et le chamanisme.
De nombreuses créations ont été produites à partir du pigment, par exemple EGP #04, une
sérigraphie qui représente une algue extraite d’une planche botanique, ou Extraction I une
fiole remplie d’eau et de pigment posée sur une étagère, à la fois sculpture et installation,
évoquant l’univers scientifique, médical, alchimique, comme une forme de mise en abîme.
Dans l’installation Chronoplast on retrouve également la présence du pigment. Dimension
mémorielle pour rappeler le processus de photosynthèse (la chlorophylle capture les
rayonnements infrarouges du soleil depuis des milliards d'années) qui a permis l’apparition
de l’atmosphère terrestre et la floraison de la vie sur terre. Dans cette œuvre EGP sert
d’encre et d’ancre : comme la trace visible d’une mémoire invisible, inatteignable par nos
moyens, mais à laquelle la technologie contemporaine nous permet d’accéder.
L’artiste rend visible, elle “met” en œuvre la beauté de la vie et l'extraordinaire travail de la
nature dans nos vies. Il est question de vie, toujours. D’une célébration de la vie au-delà du
visible. En ce sens, l’artiste crée un pont spatio-temporel grâce à ses œuvres à ce qui nous
tient en vie et dont nous avons conscience, et active de grandes questions. Dimension
mémorielle, dimension médicinale, dimension vitale, dimension existentielle, dimension
chamanique, et tout ce qui nous relie à l’univers et dont l’apparition de la chlorophylle est
une étape : toutes les œuvres faites à partir d’EGP sont donc chargées de sens et d’une
poésie mixant science et chamanisme.
Ainsi nous dit-elle que vie et mort sont liées, tressées, comme le sont guérir ou tuer, ce qui
n'est pas sans nous évoquer la notion de pharmakon
6
, abordée récemment notamment par
Bernard Stiegler. Les chamanes ouvrent des portes entre les mondes visibles et invisibles
grâce aux psychotropes. Laurie Dall’Ava ouvre des portes grâce à ses œuvres : autant de
gardiens de l’invisible.
EGP est un pigment semi-synthétique composé de deux molécules organiques modifiées
pour devenir soluble dans l’eau. EGP a des fonctions multiples. Cette création plurielle est
en effet utilisable pour l'impression sur soie, peintures, ainsi que des installations. La
chlorophylle et les cyanines (provenant de cyanobactérie) sont extrêmement fragiles par
nature et vingt-quatre heures d'exposition à la lumière ou à la chaleur seulement suffiraient à
leur faire perdre leur teinte et leurs bienfaits pharmaceutiques.
Afin de remédier à ce problème et d’augmenter la durée de vie de leur vertu antibactérienne,
une troisième molécule incolore et anti-oxydante a donc été créée et modifiée spécialement
pour être ajoutée au pigment. Triade complète. La couleur vert émeraude est l'indicateur du
fonctionnement de cette triade et de la conservation parfaite de son profil biochimique. Ce
protocole de création a permis à Laurie Dall'Ava de générer non seulement une couleur
mais une œuvre hybride, à la croisée de plusieurs univers, ancrée tout à la fois dans le
visible, l’invisible, la médecine et le chamanisme.
De nombreuses créations ont été produites à partir du pigment, par exemple EGP #04, une
sérigraphie qui représente une algue extraite d’une planche botanique, ou Extraction I une
fiole remplie d’eau et de pigment posée sur une étagère, à la fois sculpture et installation,
évoquant l’univers scientifique, médical, alchimique, comme une forme de mise en abîme.
Dans l’installation Chronoplast on retrouve également la présence du pigment. Dimension
mémorielle pour rappeler le processus de photosynthèse (la chlorophylle capture les
rayonnements infrarouges du soleil depuis des milliards d'années) qui a permis l’apparition
de l’atmosphère terrestre et la floraison de la vie sur terre. Dans cette œuvre EGP sert
d’encre et d’ancre : comme la trace visible d’une mémoire invisible, inatteignable par nos
moyens, mais à laquelle la technologie contemporaine nous permet d’accéder.
L’artiste rend visible, elle “met” en œuvre la beauté de la vie et l'extraordinaire travail de la
nature dans nos vies. Il est question de vie, toujours. D’une célébration de la vie au-delà du
visible. En ce sens, l’artiste crée un pont spatio-temporel grâce à ses œuvres à ce qui nous
tient en vie et dont nous avons conscience, et active de grandes questions. Dimension
mémorielle, dimension médicinale, dimension vitale, dimension existentielle, dimension
chamanique, et tout ce qui nous relie à l’univers et dont l’apparition de la chlorophylle est
une étape : toutes les œuvres faites à partir d’EGP sont donc chargées de sens et d’une
poésie mixant science et chamanisme.
Ainsi nous dit-elle que vie et mort sont liées, tressées, comme le sont guérir ou tuer, ce qui
n'est pas sans nous évoquer la notion de pharmakon
6
, abordée récemment notamment par
Bernard Stiegler. Les chamanes ouvrent des portes entre les mondes visibles et invisibles
grâce aux psychotropes. Laurie Dall’Ava ouvre des portes grâce à ses œuvres : autant de
gardiens de l’invisible.
EGP est un pigment semi-synthétique composé de deux molécules organiques modifiées
pour devenir soluble dans l’eau. EGP a des fonctions multiples. Cette création plurielle est
en effet utilisable pour l'impression sur soie, peintures, ainsi que des installations. La
chlorophylle et les cyanines (provenant de cyanobactérie) sont extrêmement fragiles par
nature et vingt-quatre heures d'exposition à la lumière ou à la chaleur seulement suffiraient à
leur faire perdre leur teinte et leurs bienfaits pharmaceutiques.
Afin de remédier à ce problème et d’augmenter la durée de vie de leur vertu antibactérienne,
une troisième molécule incolore et anti-oxydante a donc été créée et modifiée spécialement
pour être ajoutée au pigment. Triade complète. La couleur vert émeraude est l'indicateur du
fonctionnement de cette triade et de la conservation parfaite de son profil biochimique. Ce
protocole de création a permis à Laurie Dall'Ava de générer non seulement une couleur
mais une œuvre hybride, à la croisée de plusieurs univers, ancrée tout à la fois dans le
visible, l’invisible, la médecine et le chamanisme.
De nombreuses créations ont été produites à partir du pigment, par exemple EGP #04, une
sérigraphie qui représente une algue extraite d’une planche botanique, ou Extraction I une
fiole remplie d’eau et de pigment posée sur une étagère, à la fois sculpture et installation,
évoquant l’univers scientifique, médical, alchimique, comme une forme de mise en abîme.
Dans l’installation Chronoplast on retrouve également la présence du pigment. Dimension
mémorielle pour rappeler le processus de photosynthèse (la chlorophylle capture les
rayonnements infrarouges du soleil depuis des milliards d'années) qui a permis l’apparition
de l’atmosphère terrestre et la floraison de la vie sur terre. Dans cette œuvre EGP sert
d’encre et d’ancre : comme la trace visible d’une mémoire invisible, inatteignable par nos
moyens, mais à laquelle la technologie contemporaine nous permet d’accéder.
L’artiste rend visible, elle “met” en œuvre la beauté de la vie et l'extraordinaire travail de la
nature dans nos vies. Il est question de vie, toujours. D’une célébration de la vie au-delà du
visible. En ce sens, l’artiste crée un pont spatio-temporel grâce à ses œuvres à ce qui nous
tient en vie et dont nous avons conscience, et active de grandes questions. Dimension
mémorielle, dimension médicinale, dimension vitale, dimension existentielle, dimension
chamanique, et tout ce qui nous relie à l’univers et dont l’apparition de la chlorophylle est
une étape : toutes les œuvres faites à partir d’EGP sont donc chargées de sens et d’une
poésie mixant science et chamanisme.
Ainsi nous dit-elle que vie et mort sont liées, tressées, comme le sont guérir ou tuer, ce qui
n'est pas sans nous évoquer la notion de pharmakon
6
, abordée récemment notamment par
Bernard Stiegler. Les chamanes ouvrent des portes entre les mondes visibles et invisibles
grâce aux psychotropes. Laurie Dall’Ava ouvre des portes grâce à ses œuvres : autant de
gardiens de l’invisible.
EGP est un pigment semi-synthétique composé de deux molécules organiques modifiées pour devenir soluble dans l’eau. EGP a des fonctions multiples. Cette création plurielle est en effet utilisable pour l'impression sur soie, peintures, ainsi que des installations. La chlorophylle et les cyanines (provenant de cyanobactérie) sont extrêmement fragiles par nature et vingt-quatre heures d'exposition à la lumière ou à la chaleur seulement suffiraient à leur faire perdre leur teinte et leurs bienfaits pharmaceutiques.
Afin de remédier à ce problème et d’augmenter la durée de vie de leur vertu antibactérienne, une troisième molécule incolore et anti-oxydante a donc été créée et modifiée spécialement pour être ajoutée au pigment. Triade complète. La couleur vert émeraude est l'indicateur du fonctionnement de cette triade et de la conservation parfaite de son profil biochimique. Ce protocole de création a permis à Laurie Dall'Ava de générer non seulement une couleur mais une œuvre hybride, à la croisée de plusieurs univers, ancrée tout à la fois dans le visible, l’invisible, la médecine et le chamanisme.
De nombreuses créations ont été produites à partir du pigment, par exemple EGP #04, une sérigraphie qui représente une algue extraite d’une planche botanique, ou Extraction I une fiole remplie d’eau et de pigment posée sur une étagère, à la fois sculpture et installation, évoquant l’univers scientifique, médical, alchimique, comme une forme de mise en abîme.
Dans l’installation Chronoplast on retrouve également la présence du pigment. Dimension mémorielle pour rappeler le processus de photosynthèse (la chlorophylle capture les rayonnements infrarouges du soleil depuis des milliards d'années) qui a permis l’apparition de l’atmosphère terrestre et la floraison de la vie sur terre. Dans cette œuvre EGP sert d’encre et d’ancre : comme la trace visible d’une mémoire invisible, inatteignable par nos moyens, mais à laquelle la technologie contemporaine nous permet d’accéder.
L’artiste rend visible, elle “met” en œuvre la beauté de la vie et l'extraordinaire travail de la nature dans nos vies. Il est question de vie, toujours. D’une célébration de la vie au-delà du visible. En ce sens, l’artiste crée un pont spatio-temporel grâce à ses œuvres à ce qui nous tient en vie et dont nous avons conscience, et active de grandes questions. Dimension mémorielle, dimension médicinale, dimension vitale, dimension existentielle, dimension chamanique, et tout ce qui nous relie à l’univers et dont l’apparition de la chlorophylle est une étape : toutes les œuvres faites à partir d’EGP sont donc chargées de sens et d’une poésie mixant science et chamanisme.
Ainsi nous dit-elle que vie et mort sont liées, tressées, comme le sont guérir ou tuer, ce qui n'est pas sans nous évoquer la notion de pharmakon⁶, abordée récemment notamment par Bernard Stiegler. Les chamanes ouvrent des portes entre les mondes visibles et invisibles grâce aux psychotropes. Laurie Dall’Ava ouvre des portes grâce à ses œuvres : autant de gardiens de l’invisible.
Il ne faut jamais oublier le caractère multidimensionnel et protéiforme du travail de Laurie Dall’Ava. Chaque élément s’intègre dans le Tout. Le Tout ne se fait pas sans les éléments. « Poésie du fragment » comme dit Anne-Lou Vicente dans son texte BLOW-UP, d’une éloquence rare : « si le travail de Laurie Dall’Ava tend progressivement à incorporer d’autres médiums venant en quelque sorte les animer et les amplifier, force est de constater qu’images et documents photographiques y occupent une place déterminante et constituent la matière première de la poésie du fragment, de l’ancestral et de l’invisible qu’elle met en œuvre avec autant de finesse que de puissance ». La photographie reste la source, le point d'ancrage, de liaison de tous ses projets. Cette pratique ouverte nous évoque certains travaux articulant art et science tels que ceux par exemple de Lia Giraud, notamment l’Algaegraphie qui produit des images à partir de microalgues vertes - une mémoire rendue visible à partir du vivant - ou encore le techno-chamanisme d’Adelin Schweitzer. Avec Alphaloop V2, celui-ci nous montre qu'il n’existe pas de barrière entre nature et technologie : l’un est dans l’autre, l’autre dans l’un. L’art, avec Laurie Dall’Ava, rend visible l’invisible, fait monter le fond à la surface, montre la porosité et les allées et venues entre les mondes, l’existence. Occasion de réflexion et même plus, implication dans la réflexion. Propice à l’émancipation, donc.
¹ Centre Photographique d’Ile De France à Paris, Mécènes du Sud à Montpellier, le Parvis à Tarbes, le Creux de l’Enfer à Thiers, la Maison-Salvan à Labège, la Villa du Parc à Annemasse ; CAS-co et STUK, House for Dance, Image and Sound à Louvain en Belgique, le Museo Villa Dei Cedri àBellinzone, en Suisse.
² Synthesis, par Victor Mazière, sur le site de l’artiste : https://www.laurie-dallava.com
³ Idem.
⁴ Ibidem.
⁵ Interview avec Victor Mazière.
⁶ Dans la Grèce ancienne, le terme de pharmakon désignait à la fois le remède et le poison, ce dont il faut prendre soin : c’est une puissance curative dans la mesure et dans la démesure où c’est une puissance destructrice.
Laurie Dall'Ava, EGP #05, Emerald Green Pigment, sérigraphie, 60x60cm, 2022
Laurie Dall'Ava, EGP #02, Emerald Green Pigment Wall Painting, 40x240cm, CAS-Co Leuven Belgium, 2022
Laurie Dall'Ava. EGP #04 Emerald Green Pigment. Sérigraphie
40x50cm 2022
Laurie Dall'Ava, Extraction III, Verrerie Eau & EGP, Exposition
La profonde alliance au CAC Le Parvis
Interview
Pouvez-vous nous dire à quoi cette notion d'In-visible vous renvoie, dans l'art en général...
Est-ce que celle-ci vous parle ? Et qu'est-ce qui dans votre œuvre pourrait vous paraître relever de cette thématique, orthographiée ainsi ?
Votre question semble distinguer deux formes ou deux modalités d’invisible : la première serait privative et désignerait ce qui est privé de visibilité, tandis que la seconde, orthographiée in-visible, renverrait plutôt à une dimension itérative. L’in-visible serait « ce qui va vers le visible », ce qui monte au regard. Je crois que l’art, comme la science d’ailleurs, a toujours entretenu un lien avec le mystère, avec ce qui se cache, ce qui nous dépasse. En particulier, la photographie est née dans un contexte à la fois de révolution scientifique et de croyances ésotériques, et chez les pionniers de la photographie, il y avait cette idée de pouvoir enregistrer mécaniquement, objectivement, ce qui n’est pas normalement visible. L’appareil photographique est à la fois un œil mécanique, surnuméraire et un microscope. Si la peinture a entretenu, pendant des siècles, une relation symbolique au divin, au dieu caché, la photographie a, quant à elle, investi le champ profane de l’invisible. Vous noterez au passage le paradoxe pour un art visuel de « représenter » l’invisible car, au fond, dès que l'invisible devient visible, il change de modalité, d’échelle. Donner une sensation de l’invisible, sans le manifester, impliquerait plutôt de ménager des blancs, des espacements, des endroits où, symboliquement peut-être, l’invisible demeure en retrait, à la fois visible et caché. Dans un ensemble de photographies exposées en ce moment au Museo dei Cedri à Bellinzona en Suisse, j’ai utilisé cette méthode pour faire pressentir la dimension du temps. Le triptyque Hyphae Tipping Point, détail photographique d’un amoncellement de spores et de filaments de champignon aux teintes jaune vif se voit segmenté en 3 pans, associé à 3 carrés de blanc. Ces zones de vide représentent ce temps dont on a des traces, des survivances mais pas de témoignage ou d’archives ; il est là, présent, jusqu’à nos jours, invisible, dans le sous-sol, il marque la continuité, le fondement, il est ce qui permet la croissance.
D’une certaine façon, je pense que mon travail d’appropriation à partir d’archives récupérées, évoque beaucoup ce mouvement « entre-deux » d’in-visible, d’autant plus que je traite souvent de notions telle que la transformation, l’énergie, l’élémental, le tellurique, la perception, la conscience; des notions délicates à cerner et à représenter.
Nous sommes très intéressés par l'œuvre Emerald Green Pigment, que nous avons choisie pour notre projet, mais peut-être pourriez-vous nous suggérer d’autres pistes ou œuvres qui vous semblent relever de cette thématique, car il nous apparaît en effet que cette notion traverse votre travail ? Par exemple : Chronoplast, Symbiosis ?
Il y a en effet dans les travaux que vous mentionnez une relation à un temps géologique antérieur à toute forme de « témoignage », comme une sorte d’archive manquante de la Terre mais pourtant déterminante, puisque je m’intéresse là à « la grande oxygénation », cette période où l’atmosphère a changée du méthane, incompatible avec la vie organique telle que nous la connaissons, vers l’oxygène grâce aux cyanobactéries, qui ont été les premiers organismes photosynthétiques. Dans Symbiosis et Chronoplast, il s’agit de rendre perceptible les coopérations entre organismes qui ont abouti à l’émergence de notre premier ancêtre commun, LUCA une bactérie extrêmophile, jusqu’aux formes de vies complexes. Chronoplast est un néologisme formé du mot grec « Chronos », qui signifie le temps et du terme « chloroplaste » qui désigne les cellules où est produite la chlorophylle et où ont lieu les échanges énergétiques et biochimiques qui permettent de cliver le dioxyde de carbone en glucides dont se nourrissent les plantes et leurs champignons symbiotiques et en oxygène, qui est libéré dans l’atmosphère.
Pourriez-vous évoquer quelques artistes, philosophes, poètes, chamanes, ou chercheurs qui alimentent ou influencent votre travail, vos recherches, vos créations... ?
Je vous liste là quelques artistes et penseurs que j’apprécie tout particulièrement et dont je me sens proche : les artistes Josef Beuys, Anni et Josef Albers, Francis Alÿs, Gabriel Orozco, Wolfgang Laib... Le poète Bernard Noël, le philosophe Gilles Deleuze, l’anthropologue Philippe Descola... Et je dois dire que je suis très influencée par la musique, classique, contemporaine, du monde... et par le monde végétal.
Peut-on dire que vous seriez dans une démarche art-science ? Et en quoi l'art-science alors vous semblerait une voie pertinente pour la vie de l’art ?
Oui, on pourrait dire cela en effet. Je suis très intéressée par les décloisonnements, en général, j’intègre beaucoup d’influences dans mon travail et la science en fait bien-sûr partie (médecine, pharmacologie, botanique, géologie, chimie…) Il y a cette phrase d’Albert Einstein que j’aime tout particulièrement dans son livre Comment je vois le monde :
« La plus belle expérience que nous pouvons vivre est le mystérieux. Il représente l'émotion fondamentale qui se trouve à l'origine de l'art et de la science véritable. Quiconque ne l'a jamais rencontré et n'est plus capable de s'étonner ou de s'émerveiller est comme mort et ses yeux sont clos.»
Et enfin, une dernière question un peu à brûle-pourpoint : en quoi pour vous Emerald Green Pigment se veut-elle
In-visible ?
EGP : Emerald Green Pigment désigne avant tout un pigment organique (et non minéral comme dans l’histoire de l’art et de la peinture), réalisé en collaboration avec Victor Mazière, qui s’est chargé de l’extraction, de la cristallisation et de la synthèse chimique. C’est un mélange entre un dérivé de la chlorophylle (vert jaune) extraite de plantes et de cyanines (bleu cyan) extraites de cyanobactéries. Le mélange des deux me permet d’expérimenter et de créer différentes nuances de vert, variant en fonction des supports ou des matériaux utilisés (sérigraphies, formes liquides, peintures murales acryliques ou à l’huile sur bois ou sur toile...). J’expose en ce moment dans un centre d’art contemporain près de Genève, La Villa du Parc, et je pense au monochrome EGP #08, 1er grand format peint à l’huile sur toile avec ce pigment quasi vivant. On pourrait dire que ce travail est directement reliée à l’in-visible dans la mesure où il incarne, dans la matière, abstraite, la dimension du Temps : ce sont les molécules qui sont apparues au moment de l’oxygénation terrestre (entre 2,5 et 2,2 milliards d’années) et ont continué, inchangées, à assurer la vie sur notre planète. Il y a donc une charge très forte dans EGP, qu’il est important de souligner.
Laurie Dall'Ava monochrome EGP #08, 1er grand format peint à l’huile sur toile